UNIVERSITÉ DE SFAX

ÉCOLE SUPÉRIEURE DE COMMERCE DE SFAX

 

 EXAMEN DE THÉORIE GÉNÉRALE DE LA COMPTABILITÉ FINANCIÈRE

   Auditoire : 3ème Année SCIENCES COMPTABLES

 

Corrigé

 

Année universitaire 2000/2001

 

Session principale

 

Durée : 1 Heure 30 minutes

 

Enseignantes responsables : 

Mesdames Hanen Ghorbel & Sonda Hachicha

 

Première partie :

Question 1.

Les raisons de mise en place d’un système de gouvernement d’entreprise :

- Les faillites de certaines entreprises : Ces faillites ont été à l’origine de la mise en cause des systèmes de gouvernement d’entreprises, où sont les directeurs ? Les conseils d’administration sont-ils compétents, les vérificateurs sont-ils indépendants ? Les systèmes de contrôle sont-ils efficaces ou plutôt défaillants ? Plusieurs études récentes ont mis en évidence le lien qui existe entre le système de régie d’entreprise et la faillite des entreprises.

- Le conseil d’administration :

La composition et l’indépendance des conseils d’administration : Les actionnaires sont incités à revoir la composition des conseils d’administration qui sont caractérisés par la présence de la direction  => cumul entre la fonction de direction et la fonction de président du conseil. En plus, les administrateurs du conseil d’administration sont dans la plupart des cas des internes (salariés de l’entreprise) plutôt que des externes.

La compétence du conseil d’administration : Les administrateurs, qui occupaient leurs postes, manquaient de capacité à analyser et à gérer les problèmes résultant des changements et des mutations environnementales accrus, à cause des lacunes dans leur formation en gestion, en finance et en général leur manque d’expertise. Les administrateurs sont plutôt des gens qui cherchent le côté prestigieux de la tâche et ignorent les responsabilités qui leur incombent de part leurs fonctions en tant qu’administrateurs.

La taille du conseil d’administration : Les conseils traditionnels sont caractérisés par une grande taille (mesurée en termes de membres), ce qui entraîne une lourdeur et une inefficacité dans le processus décisionnel à cause des conflits qui peuvent se multiplier entre les membres.

Absence des comités de vérification dans les conseils d’administration : Le comité de vérification constitue un organisme fort important pour contrôler et assurer l’indépendance des vérificateurs.

Les conflits d’intérêt : l’entreprise constitue un lieu d’interaction et de conflit entre les différentes coalitions  (exemple : entre le groupe des actionnaires et celui des administrateurs ou même entre les administrateurs). 

Le cumul des sièges d’administrateurs dans plusieurs sociétés.

- Les causes liées à la haute direction :  Généralement, les dirigeants des entreprises cumulent ce poste avec celui de président du conseil d’administration et acquièrent de ce fait un poids considérable dans la nomination des administrateurs. Cette liberté de choix permet aux PDG de sélectionner des administrateurs qui leurs seront acquis et agiront en concert pour leurs propres intérêts au détriment de l’intérêt des actionnaires. Par contre, un conseil dont la majorité des membres sont des administrateurs externes peut mieux contrôler les agissements du dirigent.

- La rémunération :  Généralement, la rémunération n’est pas reliée avec la performance financière de l’entreprise, l’évaluation est généralement arbitraire, informelle et dans la plupart des cas discrétionnaire.

- Les causes reliées aux états financiers : Les normes comptables contemporaines donnent une marge discrétionnaire très importante, ce qui donne aux dirigeants la possibilité de manipuler les chiffres comptables pour maximiser leurs richesses et favoriser leurs intérêts personnels.  

Question 2.

Après 1800, les préoccupations majeures ont été la réglementation des pratiques comptables, la structuration de la comptabilité en tant que discipline et l’organisation de la recherche et sa méthodologie ; D’où le développement de la théorie comptable. Les principaux phénomènes économiques, politiques et sociaux ayant bouleversé l’évolution de la théorie comptable après 1800 sont :

  • La révolution industrielle, l’ouverture du marché des valeurs mobilières aux Etats-Unis qui se sont traduites par des lois émanant d’organismes gouvernementaux, comme la securities and exchange commission (SEC) aux Etats-Unis. Ces organismes publics exigèrent, au départ, que les états financiers qui leurs étaient soumis soient rédigés selon les principes reconnus à l’époque. Ils n’ont jamais cessé de collaborer avec la profession comptable.

  • Le développement de la profession comptable : Les institutions comptables se sont préoccupées de codifier et d’épurer les pratiques comptables en formulant une série de recommandations.

    La contribution de ces recommandations à la théorie comptable fut de réduire les pratiques divergentes et d’établir une sorte de tradition écrite des meilleures pratiques comptables.

    Ces recommandations ayant acquis de l’autorité, les instituts d’experts-comptables canadiens et américains résolurent, dans les années 60, de leur donner le statut de directives en demandant que les dérogations soient divulguées. Le principe général était que les lecteurs avaient le droit de s’attendre à ce que les pratiques comptables généralement reconnues soient suivies.

  • Croissance généralisée des entreprises.

  • Apparition des sociétés par action : juridiquement, l’entité est une personne morale distincte de ses membres.

  • Distinction entre les gestionnaires et les actionnaires.

  • Croissance accrue du nombre d’utilisateurs externes de l’information financière. 

  • L’internationalisation des échanges : une autre caractéristique de cette époque est une volonté d’harmonisation des pratiques comptables. Notons enfin que les années 1960 marquent un tournant décisif grâce au développement de la recherche fondamentale en comptabilité. C’est à dire, qu’au lieu de s’orienter seulement vers la codification et l’épuration des pratiques comptables issues de l’usage, les organisations intéressées à la comptabilité veulent, à partir de l’étude du milieu économique, des besoins des utilisateurs et des objectifs des états financiers, aboutir à la formulation de principes généraux. Il s’agit de dégager un support théorique logique sur lequel s’appuiera l’élaboration des pratiques. En d’autres termes, on tend à passer de la méthode inductive à la méthode déductive.  

 

Deuxième partie

Exercice 1 :

1- La comptabilité n’a jamais été une discipline isolée et non évolutive. D’ailleurs, les auteurs et les chercheurs dans ce domaine ne cessent d’identifier des exemples pertinents qui matérialisent l’interaction de la comptabilité avec son environnement financier, économique, politique, légal...  Plusieurs exemples peuvent donc être évoqués afin de montrer concrètement comment le facteur financier peut influencer le système comptable dans un pays donné.

L’exemple de la Tunisie constitue en lui-même une illustration adéquate. En effet, lorsque les prérogatives du pays étaient tournées vers l’agrandissement et la consolidation des entreprises, l’impératif de trouver des sources de financement importantes, qui permettront la réalisation de cet objectif, s’est fait sentir. Le pays s’est donc consacré au développement du marché boursier et l’encouragement des investissements notamment avec la création des SICAV, l’octroi d’avantages fiscaux pour les activités d’investissement... C’est ainsi que le plan comptable de 1968 n’était plus suffisant puisqu’il ne permettait pas d’avoir des assises solides pour établir des états financiers sophistiqués et attirer les investisseurs. Le développement du système comptable de 1997 a été la solution afin d’offrir aux entreprises, désireuses de s’ouvrir sur le marché boursier (financement extérieur), un référentiel comptable solide et adéquat. 

En ce qui concerne le facteur économique, on peut utiliser le même exemple en signalant que la réforme comptable Tunisienne de 1997, n’est qu’une conséquence directe d’une politique d’ouverture sur le marché international et de mondialisation. 

L’interaction entre la comptabilité et l’environnement politique peut être matérialisée par l’exemple des pays africains. En effet, plusieurs écrivains ont essayé de trouver une solution d’harmonisation des pratiques comptables Africaines avec la pratique Internationale[1]. Cependant, le statut d’anciennes colonies affaiblit considérablement ses efforts puisque, selon le pays colonisateur, les pratiques comptables diffèrent énormément en Afrique. Ainsi, pour les pays africains qui étaient colonisés par la Grande Bretagne, leurs pratiques comptables actuelles sont fortement inspirées de celles de leur colonisateur. Pour les pays qui étaient colonisés par les autres pays européens, leurs pratiques comptables sont fortement influencées par le plan comptable Francophone. 

Pour argumenter l’interaction entre la comptabilité et le facteur légal, on peut citer l’exemple des Etats-Unis où la jurisprudence et l’usage constituent les principales sources de réglementation. Ce manque de formalisme se manifeste au niveau du système comptable Américain réputé être le plus flexible. Cette flexibilité se matérialise par exemple au niveau du traitement des biens en leasing. Cependant, pour les pays caractérisés par un formalisme plus important, le système comptable de ce pays est généralement inclus dans des textes légaux (lois et décrets) ; c’est le cas par exemple du système comptable Tunisien.  

2- Les travaux de classification des chercheurs en domaine comptable ont identifié trois groupes de pratique comptable :

  • Le modèle Anglo-Américain,
  • Le modèle Continental,
  • Le modèle Sud-Américain [2] .

Les principales caractéristiques du modèle Anglo-Américain sont :

  • Un marché boursier développé et un nombre d’investisseurs important.

  • Les besoins décisionnels des bailleurs de fonds (investisseurs et créanciers) sont privilégiés.

  • Il s’appuie sur le droit coutumier et la tradition ; il favorise l’exercice du jugement professionnel et privilégie le fond sur la forme.

  • Il favorise une information de qualité à travers les rapports annuels.

  • Les utilisateurs ont une connaissance satisfaisante des affaires et de la comptabilité financière.

  • La profession comptable y est très influente et jouit d’une liberté d’action et de notoriété. 

Le modèle Continental est caractérisé par les points suivants :

  • La comptabilité privilégie les besoins spécifiques de l’Etat en matière de fiscalité et d’indicateurs macroéconomiques.

  • Il est profondément marqué par un grand formalisme dans les pratiques comptables (privilégie la forme sur le fond), héritage d’un système légal basé sur les codes, les lois et les règles rigides.

  • Les pratiques comptables sont particulièrement conservatrices basées sur la protection des intérêts des tiers et créanciers et sur le respect des politiques gouvernementales.

  • Les organes normalisateurs sont dans la plupart des cas axés sur les fonctionnaires gouvernementaux ; c’est la normalisation publique. 

Le Modèle Sud-Américain qui est très proche du modèle continental mais qui se distingue par un traitement comptable des effets de l’inflation. 

Modèles Comptables

Anglo-Américain

Continental

Sud-Américain

Professionnalisme

Contrôle statutaire

Contrôle statutaire

Flexibilité

Uniformité

Uniformité

Pertinence

Prudence

Prudence

Transparence

Discrétion

Discrétion

 

Exercice 2 :

1-   Convention du coût historique.

2-    Hypothèse de la continuité de l’exploitation - convention du coût historique.

3-    Convention de rattachement des charges aux produits - convention de réalisation de revenus.

4-    Principe de rattachement des charges aux produits, principe de prudence : Les immobilisations ont contribué à l’exploitation au cours de l’exercice et, par conséquent, il faut inclure l’amortissement dans les comptes de charges.

5-    Principe de rattachement des charges aux   produits : Le camion contribuera à l’exploitation de l’entreprise pour plusieurs exercices et, par conséquent, il faut répartir les coûts sur sa durée de vie utile.

Exercice 3 :

* Non / * Oui / * Oui / * Oui / * Oui 

Exercice 4 :

1- Conflit entre comparabilité et fiabilité : C’est le cas par exemple d’une entreprise qui utilisait la méthode d’amortissement linéaire pour son parc machines durant les derniers exercices comptables. Cependant, suite à un changement de politique d’exploitation, elle se trouve dans l’obligation de changer de méthode comptable puisqu’elle commence à faire fonctionner ses machines pendant 24h/24h. Dans ce cas, l’entreprise doit sacrifier la qualité de comparabilité (puisqu’elle changera sa méthode d’amortissement du linéaire vers l’accéléré) au profit de la qualité de fiabilité (puisque cette méthode reflète mieux la situation de l’entreprise). En cas de conflit entre comparabilité et fiabilité, il faut privilégier la qualité fondamentale ; la fiabilité.

- Conflit entre pertinence et fiabilité : Il y a conflit entre ces deux qualités fondamentales lorsque l’information divulguée est une image fidèle de la réalité, neutre et vérifiable mais elle arrive plus tard que nécessaire de telle sorte qu’elle n’a plus ni une valeur prédictive ni une valeur rétrospective. On peut citer l’exemple d’états financiers intermédiaires d’une entreprise qui ne sont publiés qu’après la publication du rapport annuel. En cas de conflit entre les deux qualités fondamentales de l’information financière, il faut privilégier celle qui aura un impact plus important sur le processus de prise de décision si elle serait écartée. 

2- Dans ce cas, il y a un abandon de la qualité de comparabilité de l’information financière au profit de la qualité de fiabilité puisque la fiabilité est une qualité fondamentale et qu’il faut donc privilégier. En effet, la situation réelle de l’entreprise rend obligatoire l’abandon de la méthode d’amortissement linéaire afin d’adopter la méthode d’amortissement accéléré. La méthode d’amortissement linéaire ne répond plus au concept d’image fidèle.

-     Le système comptable offre, aux entreprises, différentes méthodes de valorisation et d’évaluation entre lesquelles l’entreprise doit choisir celle qui convient au mieux aux spécificités de son exploitation.  En vertu de la convention de permanence des méthodes, l’entreprise doit adopter le même référentiel de valorisation et d’évaluation d’un exercice à un autre afin d’obtenir une information financière comparable dans le temps. La dérogation à ce principe est néanmoins possible dans le cas où la situation réelle de l’entreprise ne permettrait plus la conservation du même référentiel. Dans ce cas, le privilège est accordé à la qualité de fiabilité au détriment de la qualité de comparabilité. 

-       Il s’agit d’un cas où l’information divulguée est  pertinente puisqu’elle a eu un effet sur le cours boursier. Autrement dit, cette information a une valeur prédictive ou rétrospective puisqu’elle semble être déjà intégrée dans les anticipations des investisseurs. L’information divulguée est dans ce cas pertinente pour les décideurs.

3- La comptabilité essaie de satisfaire tout le monde, tâche des plus ardues étant donné que les besoins d’un groupe peuvent aller à l’encontre de ceux des autres groupes. En effet, l’information financière est destinée aussi bien aux utilisateurs internes qu’externes. Pour ce qui est des utilisateurs internes, la direction a besoin d’une information sur les opérations quotidiennes, les cycles d’exploitation, de financement et d’investissement mais elle n’est pas, dans tous les cas, motivée pour divulguer des informations sur une situation défaillante puisque ses besoins de capitaux lui dictent la divulgation d’une information qui attire les investisseurs et ne répugne pas le banquier.

Or, ces besoins ne sont pas forcément ceux de l’Etat qui a besoin d’une information sur les entreprises en difficulté ou en état de cessation de paiement ainsi qu’une information qui peut remplir les prérogatives de contrôle et de collecte. Les besoins de l’Etat sont généralement orientés vers les indicateurs fiscaux, macroéconomiques et statistiques.

Les bailleurs de fonds ont besoin eux d’une information financière qui leur permet d’évaluer et de comparer les performances des entreprises afin de prendre les décisions adéquates en matière d’investissement et de crédits. 

-       Vu l’existence de groupes d’utilisateurs diversifiés et n’ayant pas les mêmes objectifs, l’information financière, divulguée dans les états financiers, n’est pas destinée à satisfaire tous les utilisateurs potentiels (investisseurs, créanciers, clients, fournisseurs, Etat, salariés…) mais, elle est plutôt destinée à satisfaire les besoins d’un groupe particulier d’utilisateurs. Le choix des utilisateurs privilégiés constitue donc une prérogative importante pour tout système comptable pour pouvoir se prononcer sur les objectifs de l’information comptable et accroître l’utilité de l’information aux utilisateurs. D’ailleurs, en déterminant les objectifs de la comptabilité, le cadre conceptuel fixe les besoins informationnels à satisfaire.


[1] Ollier C., «Les normes comptables dans les pays d’Afrique», Revue Française de Comptabilité, Juillet - Août 1999, N° 313, pages 60-70.

[2] Abdessettar Mabkhout, «Recherche comptable et normalisation internationale», Colloque des experts-comptables Tunisiens, 1997.