Contrôle interne 

et organisation comptable de l'entreprise

Le nouveau système comptable consacre d'importants développements au contrôle interne et à l'organisation comptable des entreprises. S'agissant de textes réglementaires, les dispositions du nouveau système comptable sont d'application obligatoire. Mais, même en dehors de la considération légale, lesdites dispositions sont suffisamment pertinentes pour que tous les comptables trouvent intérêt à les intégrer sérieusement et avec compétence dans leur démarche professionnelle.

Section 1. Considérations relatives au contrôle interne et à l'organisation comptable

§ 1. La comptabilité, un élément important du contrôle interne et de l'organisation de l'entreprise

Le système comptable de l'entreprise doit être organisé de manière efficace pour être à même de produire l'information financière requise (NCG, 2ème partie, § 1, alinéa 1).

L'organisation comptable est une composante de base de l'organisation générale de l'entreprise dans la mesure où elle va permettre de saisir et de mesurer l'ensemble de ses éléments en vue de les refléter et de les maîtriser (NCG, 2ème partie, § 2).

L'organisation générale suppose l'existence de systèmes de contrôle interne efficaces dont l'une des composantes est constituée par l'organisation et la tenue de la comptabilité financière (NCG, 2ème partie, § 3, alinéa 1).

§ 2. La comptabilité, un élément directement affecté par le contrôle interne et l'organisation de l'entreprise

Les normes d'organisation et de contrôle interne comptables visent à guider les entreprises pour la mise en place d'une organisation adéquate couvrant toutes les fonctions de leur entité pour que leurs états financiers répondent aux objectifs et caractéristiques qui leur sont assignés (NCG, 2ème partie, § 1, alinéa 2).

Pour que l'information produite par la comptabilité puisse vérifier les caractéristiques qualitatives prévues par le cadre conceptuel, l'entreprise doit mettre en place des systèmes de contrôle interne efficaces (NCG, 2ème partie, § 6, alinéa 1).

§ 3. Responsabilité de l'organisation et de la tenue de la comptabilité

La responsabilité de l'organisation et de la tenue de la comptabilité incombe à la direction générale de l'entreprise (NCG, 2ème partie, § 3, alinéa 2).

Il incombe à la Direction Générale de l'entreprise de mettre en place les systèmes adéquats de contrôle interne (NCG, 2ème partie, § 14, alinéa 1).

§ 4. Le chemin de révision

Une documentation décrivant les procédures et l'organisation comptables est établie en vue de permettre la compréhension et le contrôle du système de traitement ; cette documentation est conservée aussi longtemps qu'est exigée la conservation des documents comptables auxquels elle se rapporte (NCG, 2ème partie, § 51).

L'organisation du système de traitement assure l'existence du chemin de révision. A tout moment, il est possible de reconstituer à partir des pièces justificatives appuyant les données entrées, les éléments des comptes, états et renseignements soumis à la vérification, ou, à partir de ces comptes, états et renseignements, de retrouver ces données et les pièces justificatives (NCG, 2ème partie, § 52).

Section 2. Le contrôle interne

Les développements consacrés au contrôle interne visent à permettre aux entreprises d'évaluer leurs dispositifs de contrôle interne et de déterminer comment les améliorer.

Les petites et moyennes entreprises peuvent s'en inspirer, compte tenu de l'environnement de leur contrôle (NCG, 2ème partie, § 5, alinéa 2).

Pour que l'information produite par la comptabilité puisse vérifier les caractéristiques qualitatives prévues par le cadre conceptuel, l'entreprise doit mettre en place des systèmes de contrôle interne efficaces (NCG, 2ème partie, § 6, alinéa 1).

§ 1. Définition

Le contrôle interne est défini, globalement, comme étant un processus mis en œuvre par la direction, la hiérarchie, le personnel d'une entreprise, et destiné à fournir une assurance raisonnable quant à la réalisation des objectifs ci-dessus énoncés (NCG, 2ème partie, § 7).

§ 2. Objectifs du contrôle interne

 De tels systèmes ont pour objectifs de (NCG, 2ème partie, § 6, alinéa 2) :

  • promouvoir l'efficience et l'efficacité,

  • protéger les actifs,

  • garantir la fiabilité de l'information financière,

  • assurer la conformité aux dispositions légales et réglementaires.

§ 3. Composantes du contrôle interne

Le contrôle interne comporte cinq composantes qui sont (NCG, 2ème partie, § 8) :

  • l'environnement de contrôle,

  • l'évaluation et la maîtrise des risques,

  • les activités de contrôle,

  • l'information et la communication,

  • le pilotage.

(1) Environnement de contrôle

L'environnement de contrôle est un élément très important de la culture d'une entreprise, dans la mesure où il détermine le niveau de sensibilisation du personnel au besoin de contrôles. Il constitue le fondement de tous les autres éléments du contrôle interne en  imposant discipline et organisation. Les facteurs ayant un impact sur l'environnement de contrôle comprennent, notamment, l'intégrité, l'éthique et la compétence du personnel, la philosophie et le style de management des dirigeants, la politique de délégation des responsabilités, d'organisation et de formation du personnel et enfin, l'intérêt manifesté par le Conseil d'Administration (ou autre organe d'administration) et sa capacité à définir les objectifs (NCG, 2ème partie, § 9).

(2) Évaluation des risques

Toute entreprise est confrontée à un ensemble de risques externes et internes qui doivent être évalués. Avant de procéder à cette évaluation, il est nécessaire de définir des objectifs compatibles et cohérents. L'évaluation et la maîtrise des risques consistent en l'identification et l'analyse des facteurs susceptibles d'affecter la réalisation de ces objectifs : il s'agit d'un processus qui permet de déterminer comment ces risques devraient être gérés. Compte tenu de l'évolution permanente de l'environnement micro et macroéconomique, du contexte réglementaire et des conditions d'exploitation, il est nécessaire de disposer de méthodes permettant d'identifier et de maîtriser les risques spécifiques liés au changement (NCG, 2ème partie, § 10).

(3) Activités de contrôle

Les activités de contrôle peuvent se définir comme étant l'application des normes et procédures qui contribuent à garantir la mise en œuvre des orientations émanant du management. Ces opérations permettent de s'assurer que les mesures nécessaires sont prises en vue de maîtriser les risques susceptibles d'affecter la réalisation des objectifs de l'entreprise. Les activités de contrôle sont menées à tous les niveaux hiérarchiques et fonctionnels de la structure et comprennent des actions aussi variées qu'approuver et autoriser, vérifier et rapprocher, apprécier les performances opérationnelles, la protection des actifs ou la séparation des fonctions (NCG, 2ème partie, § 11).

(4) L'information et la communication

L'information pertinente doit être identifiée, recueillie et diffusée sous une forme et dans des délais qui permettent à chacun d'assumer ses responsabilités. Les systèmes d'information produisent, entre autres, des données opérationnelles, financières ou encore liées au respect des obligations légales et réglementaires, qui permettent de gérer et de contrôler l'activité. Ces systèmes traitent, non seulement, des données produites par l'entreprise, mais également celles émanant de l'extérieur (événements, marche de l'activité, contexte général..) et qui sont nécessaires à la prise de décisions en matière de conduite des affaires et de communication externe (NCG, 2ème partie, § 12, alinéa 1).

Il existe également un besoin plus large de communication efficace, communication à la fois ascendante, descendante et horizontale (NCG, 2ème partie, § 12, alinéa 2).

Le management doit transmettre un message clair à l'ensemble du personnel sur l'importance des responsabilités en matière de contrôle. Les employés doivent comprendre le rôle qu'ils sont appelés à jouer dans le système de contrôle interne ainsi que la relation existante entre leurs propres activités et celles des autres membres du personnel. Ils doivent être en mesure de faire remonter les informations importantes. Par ailleurs, une communication efficace avec les tiers, tels que clients, fournisseurs, autorités de tutelle ou actionnaires, est également nécessaire (NCG, 2ème partie, § 12, alinéa 3).

(5) Pilotage

Les systèmes de contrôle interne doivent, eux mêmes, être contrôlés afin qu'en soient évaluées, dans le temps, les performances qualitatives. Pour cela, il convient de mettre en place un système de suivi permanent ou de procéder à des évaluations périodiques, ou encore de combiner les deux méthodes. Le suivi permanent s'inscrit dans le cadre des activités courantes et comprend des contrôles réguliers effectués par le management et le personnel d'encadrement, ainsi que d'autres techniques appliquées par le personnel à l'occasion de ses travaux. L'étendue et la fréquence des évaluations périodiques dépendront essentiellement de l'évaluation des risques et de l'efficacité du processus de surveillance permanente. Les faiblesses de contrôle interne doivent être portées à l'attention de la hiérarchie. Les lacunes les plus graves devant être signalées aux dirigeants et au Conseil d'Administration (ou autre organe d’administration) (NCG, 2ème partie, § 13).

§ 4. Mise en œuvre du contrôle interne

Il incombe à la Direction Générale de l'entreprise de mettre en place les systèmes adéquats de contrôle interne (NCG, 2ème partie, § 14, alinéa 1).

Parmi les facteurs d'une importance particulière dans la mise en œuvre des systèmes de contrôle interne on retient particulièrement (NCG, 2ème partie, § 14, alinéa 2) :

  • la protection physique des actifs et des enregistrements,

  • le système de définition des pouvoirs,

  • les plans financiers et les budgets,

  • l'information et la documentation,

  • l'examen indépendant et les contrôles de performance, et

  • la séparation des tâches.

(1) Protection physique des actifs et des enregistrements

Il s'agit de la mise en place d'un système prévoyant des précautions pour empêcher les pertes, les vols ou le détournement d'actifs et de documents officiels ainsi que les enregistrements erronés (NCG, 2ème partie, § 15).

(2) Système de définition des pouvoirs

Il consiste généralement en la tenue d'un "manuel de définition des tâches" qui permet à la Direction d'attribuer les pouvoirs ou de les restreindre pour accomplir ou mener des actions ou transactions (NCG, 2ème partie, § 16, alinéa 1).

La structure organisationnelle de l'entreprise fournit le cadre général pour la planification, la direction, l'exécution et le contrôle des activités (NCG, 2ème partie, § 16, alinéa 2).

Un système satisfaisant de définition des pouvoirs doit (NCG, 2ème partie, § 16, alinéa 3) :

  • couvrir toutes les activités de l'entreprise,

  • définir clairement les niveaux de pouvoir d'une personne donnée,

  • correspondre au niveau de responsabilité professionnelle de la personne, et

  • être mis à jour en tenant compte des changements pertinents.

(3) Plans financiers et budgets

Ils définissent les stratégies et objectifs en termes financiers et servent de point de départ pour établir les priorités, attribuer les ressources et mesurer les performances. En raison de la rigueur de son approche, le contrôle budgétaire facilite la détection, à temps, des écarts par rapport aux plans et des erreurs ou des irrégularités (NCG, 2ème partie, § 17).

(4) Informations et documentation

Pour remplir les objectifs assignés à l'information financière, il convient d'entretenir un système d’information adéquat capable d'identifier, de classer, d'enregistrer et de communiquer les données conformément aux règles du système comptable tunisien et aux obligations légales (NCG, 2ème partie, § 18, alinéa 1).

Les opérations doivent être correctement enregistrées pour permettre au système d'information de fournir des rapports fiables (NCG, 2ème partie, § 18, alinéa 2).

L'enregistrement des opérations doit se faire de manière correcte en répondant aux objectifs de contrôle (NCG, 2ème partie, § 18, alinéa 3).

Un "enregistrement correct" suppose un certain nombre de caractéristiques clés (assertions) (NCG, 2ème partie, § 18, alinéa 4) :

• Validité : Les transactions font l'objet des autorisations appropriées et sont reflétées avec sincérité lors de l'enregistrement les concernant. Seules sont enregistrées les opérations qui se sont réellement produites et susceptibles d'avoir un impact sur l'entreprise. Des pièces justificatives doivent permettre de vérifier les opérations.

• Exhaustivité : Toutes les transactions et les effets des événements associés qui se sont produits pendant la période concernée sont enregistrés.

• Exactitude : Les montants des opérations sont correctement énoncés ou calculés. Les soldes sont correctement cumulés en termes de valeur, d'exercice comptable et de classement. Les actifs et les passifs ont été correctement évalués et les montants exacts imputés aux postes de charges et de produits de l'exercice comptable correct.

• Enregistrement : Les enregistrements sont opérés en temps voulu, rapidement après la survenance de l'opération, sont rattachés à la bonne période et sont correctement reflétés dans les livres et documents comptables.

(5) Examen indépendant et contrôle de performance

L'objectif est de vérifier si les contrôles internes fonctionnent correctement (NCG, 2ème partie, § 19, alinéa 1).

Les contrôles de performance visent à fournir des retours d'information indépendants en décelant les erreurs ou les irrégularités. Normalement, ces contrôles font intervenir le rapprochement et l'examen des enregistrements comptables internes avec des documents externes, ou la vérification de la concordance des actifs enregistrés avec les existants réels. Ce type de contrôle peut prendre la forme par exemple de rapprochements bancaires, de comptages de caisse, d'examen par la direction des rapprochements bancaires et des rapports de contrôle de crédit, ou des prises d'inventaire physique. L'audit interne peut être, quand la taille et le secteur de l'entreprise le justifient et, quand il répond aux critères appropriés, notamment, d'indépendance et de compétence, un moyen d'examen des systèmes de contrôle interne à même d'améliorer leur efficacité (NCG, 2ème partie, § 19, alinéa 2).

(6) Séparation des tâches

Une séparation adéquate des tâches doit permettre de s'assurer que les erreurs sont décelées et de limiter les risques de dissimulation d'irrégularités (NCG, 2ème partie, § 20, alinéa 1).

Il convient d'organiser les tâches de façon que, pour une même opération, une même personne ne puisse pas être en mesure de commettre des omissions, des erreurs ou des fraudes et de les dissimuler dans le cours normal des tâches qui lui sont confiées (NCG, 2ème partie, § 20, alinéa 2).

Cette organisation doit éviter l'attribution, à une même personne, de tâches incompatibles consistant, à la fois, en (NCG, 2ème partie, § 20, alinéa 3) :

  • la conservation des actifs,

  • l'autorisation des transactions liées à ces actifs,

  • la tenue des enregistrements et comptes y afférents,

  • l'exécution de la tâche, et

  • le contrôle.

Section 3. La documentation de la fonction comptable

§ 1. Le manuel comptable de l'entreprise (NCG, 2ème partie, § 63)

Le manuel comptable de l'entreprise décrit particulièrement l'organisation comptable de l'entreprise, les méthodes de saisie et de traitement des informations, les politiques comptables et les supports utilisés.

Il comprend notamment les informations ayant trait :

  • à l'organisation générale de l'entreprise,

  • à l'organisation comptable de l'entreprise,

  • au plan des comptes et à la description du contenu des comptes et un guide des imputations comptables,

  • à la description des procédures de collecte, de saisie, de traitement et de contrôle des informations,

  • au système de classement et d'archivage,

  • aux livres comptables obligatoires et aux liens entre ces livres et autres documents et pièces comptables,

  • au modèle retenu de présentation des états financiers,

  • au guide de justification des comptes et des travaux d'inventaire avec des modèles de rapprochement et d'états de justification pour les travaux récurrents,

  • au modèle d'instructions d'inventaire,

  • à l'organisation des travaux d'élaboration et de présentation des états financiers.

§ 2. Document décrivant l'organisation comptable

Lorsque l'entreprise opte pour la méthode de centralisation mensuelle des livres et journaux auxiliaires ou pour l'usage de l'informatique pour tenir sa comptabilité, il est établi un document qui prévoit l'organisation comptable et comporte notamment les intitulés et l'objet des documents utilisés pour le traitement des informations et les modalités de liaison entre ces documents et les pièces justificatives y afférentes (Loi comptable, article 15).

§ 3. Document décrivant les supports comptables

Un document identifiant les supports comptables et définissant leur contenu ainsi que les procédures de saisie et de traitement des données dans la comptabilité et les liens entre pièces et livres comptables doit être établi particulièrement pour les entreprises qui procèdent à la centralisation mensuelle ou qui tiennent leur comptabilité au moyen de systèmes informatisés. Ce document peut être contenu dans le manuel comptable de l'entreprise prévu au paragraphe 63 de la 2ème partie de la norme comptable générale ou tenu de manière séparée (NCG, 2ème partie, § 26, alinéa 2).

Une documentation décrivant les procédures et l'organisation comptables est établie en vue de permettre la compréhension et le contrôle du système de traitement ; cette documentation est conservée aussi longtemps qu'est exigée la conservation des documents comptables auxquels elle se rapporte (NCG, 2ème partie, § 51).

L'organisation du système de traitement assure l'existence du chemin de révision. A tout moment, il est possible de reconstituer à partir des pièces justificatives appuyant les données entrées, les éléments des comptes, état et renseignements soumis à la vérification, ou, à partir de ces comptes, états et renseignements, de retrouver ces données et les pièces justificatives (NCG, 2ème partie, § 52).

§ 4. Manuel des opérations comptabilisées en devises

La comptabilité est tenue en dinars tunisiens. L'arrondi n'est pas admis dans l'enregistrement des opérations. Il n'est admis que pour la présentation (NCG, 2ème partie, § 62, alinéa 1).

Une opération libellée en une monnaie, autre que le dinar, peut être enregistrée sans être convertie si la nature de l'opération et l'activité de l'entité le justifient (NCG, 2ème partie, § 62, alinéa 2).

Dans ce cas, seul le solde du compte enregistrant ces opérations est converti en dinars à la date de clôture de l'exercice avec l'obligation de renseigner sur les bases de conversion et de décrire, dans un document, les procédures utilisées pour le traitement de ces opérations. Ce document peut être inclus dans le manuel comptable ou tenu séparément (NCG, 2ème partie, § 62, alinéa 3).